Un nouveau médicament pour soigner les victimes d’un accident nucléaire

Un nouveau médicament pour soigner les victimes d’un accident nucléaire

Un nouveau médicament pour soigner les victimes d’un accident nucléaire 1600 1067 Bünkl

Les essais cliniques de phase 1 pour tester l’efficacité d’un nouveau traitement destiné à éliminer les particules radioactives de l’organisme ont commencé. Il s’agit pour le moment de vérifier l’innocuité sur une petite population de sujets humains en bonne santé. Mais les résultats sont très prometteurs !

Après 30 ans de recherche et de développement, des scientifiques testent un traitement prometteur destiné à éliminer par chélation* les particules radioactives présentent dans l’organisme d’une personne qui aurait été exposée à une contamination ou cutanée ou par inhalation ou par ingestion.

* La chélation appelée aussi séquestration ou complexation, est un procédé médical visant à éliminer la présence de métaux nuisibles dans l’organisme à l’aide d’un agent chélateur chimique ou organique.

La menace d’une contamination radioactive intentionnelle ou accidentelle fait partie des plus grandes peurs dans l’imaginaire collectif

On se souvient qu’en 1986, la catastrophe de la centrale nucléaire de Tchnernobyl avait entraîné bon nombre de décès par irradiation aiguë, plus de 350.000 évacuations et des milliers de cancers de la thyroïde quelques années plus tard. Tchernobyl occupe une place prépondérante dans nos souvenirs mais peu se souviennent que quelques années auparavant, en 1979, l’Amérique connaissait son pire incident nucléaire avec centrale de Three Mile Island en Pennsylvanie. À la suite d’une chaîne d’événements, cette centrale avait vu le cœur de son réacteur N°2 fondre partiellement libérant ainsi une faible quantité de radioactivité dans l’environnement. Cet accident est classé au niveau 5 de l’échelle internationale des événements nucléaires (INES) contre 7 pour Tchnernobyl.

C’est à la suite de cet événement NRBC que le gouvernement américain a alloué des moyens financiers importants pour la recherche de contre-mesures médicales pour les menaces nucléaires. Rebecca ABERGEL, chimiste inorganicienne à l’université Berkeley de Californie et au Laboratoire national Lawrence-Berkeley et ses collègues du SRI International — un institut de recherche californien — ont entamés les essais cliniques d’un médicament prometteur, l’HOPO 14-1 (hydroxypyridinone) qui agit sur les substances contaminantes radioactives telles que l’uranium et le plutonium.

Jusqu’ici, les options de traitement étaient limitées en cas d’irradiation. Le diéthylène-triamine-penta-acétique (DTPA) était l’un des rares composé contre l’irradiation par les métaux lourds radioactifs utilisés dans les armes atomiques et les centrales nucléaires (famille des actinides allant de l’actinium N°89 au lawrencium N°103). Cette substance chimique approuvée dans les années 1960 par la FDA (Food and Drug Administration, agence fédérale américaine de contrôle des denrées alimentaires et médicaments) est un agent chélateur, c’est-à-dire une molécule dont les liaisons chimiques permettent de capturer les métaux toxiques en fixant leurs cations métalliques pour constituer un complexe stable non ionisé, non toxique, facilement transporté jusqu’aux reins pour être évacué par les urines.

Le DTPA a cependant un cadre d’utilisation strict et limité. En effet, il ne fonctionne que sur trois actinides (plutonium, américium et curium) et doit être administré dans les vingt-quatre heures suivant l’exposition, faute de quoi il perd rapidement en efficacité à mesure que les substances contaminantes radioactives se fixent dans les tissus et les organes. Son administration par voie intraveineuse le rend peu pratique car il requiert un professionnel et complique son déploiement dans les situations où les victimes sont nombreuses. Enfin, le principal inconvénient du DTPA est qu’il capture également les minéraux essentiels au fonctionnement de notre organisme, comme le calcium et le zinc.

Un traitement inspiré par la chimie hôte-invité

Pour mettre au point un meilleur agent chélateur pour ces substances radioactives, les scientifiques se sont comme souvent tournés vers la nature et plus précisément vers les bactéries et la manière dont elles transportent le fer. Le fer est un nutriment essentiel pour de nombreux organismes. Ainsi, les bactéries ont développé des agents chélateurs très spécifiques pour le capturer. “Lors de l’invasion d’un système hôte-invité, les bactéries envoient des molécules appelées sidérophores, qui capturent le fer, forment avec lui des complexes très stables et le ramènent dans la cellule bactérienne”, explique Rebecca ABERGEL qui est également cofondatrice de HOPO Therapeutics.

Inspirés par ces complexes hôte-invité, Kenneth Raymond et Patricia Durbin, qui ont conseillé Rebecca ABERGEL lors de ses études à l’université de Californie du campus de Berkeley, se sont appuyés sur les similitudes chimiques entre le fer et les métaux lourds et ont commencé à concevoir des chélateurs il y a une trentaine d’années.

L’HOPO 14-1 en cours d’essais cliniques est apparu comme un candidat à fort potentiel, révélant une affinité particulière avec l’uranium, le neptunium, le plutonium, l’américium et le curium. Certains de ces métaux sont de grande taille, il faut donc un chélateur qui puisse les “envelopper complètement”, explique Rebecca ABERGEL. Avec ses quatre “griffes” moléculaires et deux sites de liaison par griffe, l’HOPO 14-1 peut saisir un métal radioactif cible en huit endroits, le fixer fermement et l’envoyer dans l’intestin pour qu’il soit éliminé dans les fèces.

De plus, le médicament ne semble pas capturer les molécules nécessaires à notre physiologie, ce qui le rend moins toxique que le DTPA. Même à une dose cent fois supérieure à la normale, les cellules humaines cultivées en boîte de Pétri continuent de fonctionner et semblent normales. Contrairement au DPTA, il reste efficace lorsqu’il est administré jusqu’à quarante-huit heures avant ou sept jours après l’exposition aux rayonnements.

Un autre intérêt non-négligeable de l’HOPO 14-1 est qu’il se présente sous la forme d’un comprimé. Une solution d’administration simple et pratique, facile à stocker et transporter qui peut être directement larguée par avion dans les zones contaminées sans exposer inutilement les premiers intervenants aux radiations. Une molécule qui pourrait donc changer la donne dans le cadre du traitement des personnes contaminées par des particules radioactives.

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